Kadiatou, au-delà du courage
écrit le 27.02.2020Victime d’une malformation cardiaque, Kadiatou avait peu de chances de s’en sortir, avant que Terre des hommes ne la prenne par la main. Les moments forts de sa course contre la mort.
Kadiatou arrive en Suisse le 5 décembre 2019, après un long périple au départ de la Guinée. Agée de 10 ans, la jeune fille souffre d’une malformation cardiaque congénitale, qui nécessite une chirurgie complexe ne pouvant être réalisée chez elle. Sa maladie a été rapidement détectée. Suivie par des médecins depuis l’âge de 3 mois, Kadiatou est référée à Terre des hommes dans l’espoir d’un transfert vers la Suisse. Objectif: bénéficier d’une opération à cœur ouvert, qui lui permettra de vivre et grandir normalement. Après approbation de son dossier, elle entame son «voyage vers la vie» au début du mois de décembre 2019.
Parfums de mandarines à son arrivée
Après son arrivée à l’aéroport de Genève, Kadiatou est accompagnée au CHUV à Lausanne, où elle passe les premières 24 heures de son séjour en Suisse. Les médecins y effectuent divers examens médicaux ainsi qu’un bilan cardiaque, qui permet de confirmer le diagnostic posé dans son pays d’origine. Après ce bref séjour hospitalier, Kadiatou rejoint La Maison le 6 décembre, jour de la Saint-Nicolas. A l’approche des fêtes de fin d’année, une trentaine d’autres petits pensionnaires séjournent déjà à Massongex.
Une école d’intégration
Un peu timide et ne comprenant que peu le français, Kadiatou s’intègre petit à petit au groupe. Elle se rend, comme tous les enfants déjà scolarisés, à l’école de La Maison et prend part aux différentes activités quotidiennes en séjour.
A son chevet: les meilleurs
Son intervention chirurgicale est rapidement programmée au CHUV. A peine une semaine après son arrivée, elle est attendue au bloc opératoire. Durant près de deux heures, plusieurs chirurgiens spécialisés en cardiologie pédiatrique s’affairent à réparer son petit cœur malade. L’opération est un succès.
L’impatience du retour
La période de convalescence commence d’abord à l’hôpital durant quelques jours. Puis les médecins lui permettent de revenir à La Maison, où l’équipe de l’infirmerie suit de très près son évolution. L’impatience de la jeune fille se fait parfois ressentir puisque, plus que tout, elle veut retrouver ses proches chez elle, en Guinée. Mais il faut donner le temps à son corps de se remettre de cette lourde opération. Elle fête Noël à La Maison, avec tous les autres petits pensionnaires présents et participe à de nombreux ateliers organisés à l’école.
La peur au ventre
Le 15 janvier, nous l’accompagnons au CHUV pour une consultation, afin de contrôler l’état de son petit cœur un peu plus d’un mois après son opération. A 7h30, Kadiatou nous attend. Dans le couloir de La Maison qui mène vers l’infirmerie, la jeune fille est adossée contre le mur, vêtue d’une doudoune blanche et portant un petit sac en bandoulière coloré. Elle regarde ses pieds. On l’appelle et elle nous regarde, acquiesce comme pour nous dire qu’elle est prête. Quelques minutes plus tard, nous sommes en route pour Lausanne. Assise à l’arrière de la voiture sur un rehausseur, Kadiatou semble quelque peu nerveuse. Se tenant les mains, elle regarde ses petits pieds – encore et toujours. Lorsque nous nous retournons pour la regarder, elle sourit timidement.
Ecouter son cœur
Arrivée au CHUV, dans le secteur de la cardiologie pédiatrique situé au 10e étage, Kadiatou désigne la chambre dans laquelle elle a séjourné après son opération: «Moi, ici. Opération». Nous patientons quelques minutes dans la petite salle d’attente. On lui demande si ça va, elle répond peureusement que oui. Une assistante médicale vient rapidement nous chercher et nous entrons en consultation. On mesure Kadiatou, on la pèse. Elle s’allonge sur le lit afin qu’on prenne sa tension. L’assistante médicale attache le tensiomètre autour de son petit bras. Elle la regarde faire, non sans crainte, puis observe la pièce, dont les murs sont garnis d’autocollants colorés. Le soleil perce entre les lames du store de la fenêtre, les rayons illuminent son visage. L’assistante médicale tend les patchs autocollants des électrodes du cardiogramme à Kadiatou et lui montre où les placer sur son torse. Le rythme du petit cœur s’affiche alors sur l’écran de la salle de consultation. Il est régulier et les lignes qui dessinent les battements semblent fasciner Kadiatou, qui concentre son regard sur l’écran.
Quelques minutes plus tard, le Dr Barry – originaire de Guinée, en formation au CHUV – entre dans la pièce pour procéder à une échographie du cœur de la jeune fille. Il se présente à Kadiatou, prend connaissance de son dossier médical, dont les informations ont été complétées par l’infirmerie de La Maison le matin même, l’installe sur le lit et prend place derrière l’échographe. Il applique le gel sur la sonde, qu’il place ensuite sur le torse de Kadiatou. Le Dr Barry observe son cœur qui se contracte, tandis que la jeune fille, quelque peu nerveuse, regarde les murs de la pièce. L’examen dure une trentaine de minutes. Kadiatou perd parfois patience et s’agite un peu. Le Dr Barry lui explique qu’il est important qu’elle bouge le moins possible.
La joie du «OK départ!»
Satisfait des images qu’il a pu enregistrer, le Dr Barry essuie le gel sur le torse. Kadiatou se lève et demande au médecin «Ok départ?». Elle cherche à savoir si elle pourra rentrer chez elle. Dr Barry sourit, et dit «Oui, tu peux rentrer en Guinée». Il est 9h30 et le soleil est perçant ce matin, mais à cet instant très précis, c’est le sourire de Kadiatou qui illumine la pièce toute entière.
2020, une nouvelle vie qui commence
Enfin! Le soulagement de la jeune fille est palpable et son bonheur immense. Lors du voyage retour jusqu’à La Maison, l’ambiance dans la voiture est tout autre. Au rythme des chansons de Sona Tata, artiste guinéenne, Kadiatou chante et danse. La nouvelle du retour chez elle, plus proche que jamais, semble avoir libéré la jeune fille, qui retrouve son magnifique sourire.