La Maison, un lieu pour renaître
écrit le 23.12.2024Retour émouvant à La Maison pour Iman, brûlée vive à l’âge de 8 ans et soignée en Suisse entre 1985 et 1987
En juillet dernier, presque 40 ans après son séjour à La Maison, Iman est revenue à Massongex avec ses enfants, Saïd et Abraham, 10 ans et 6 ans. C’est à peu près aux mêmes âges que son grand frère Imad et elle sont brûlés vifs au Liban, en avril 1985, lors de l’explosion d’une bonbonne de gaz pendant la guerre alors en cours. Ils sont sauvés des flammes par leur mère, mais perdent ce jour-là leurs cinq frères et sœurs. Gravement touchés au visage, aux bras et aux mains, les deux jeunes Libanais sont transférés en Suisse en novembre 1985. Ils séjournent à La Maison entre 1985 et 1987, avec plusieurs hospitalisations à Lausanne et Genève. Retour sur une visite familiale émouvante.
Un cocon salvateur
« Après mon accident au Liban, à l’âge de 8 ans, j’ai eu la chance d’être soignée en Suisse et accueillie à La Maison », explique Iman. Le 30 juillet dernier, c’est donc avec beaucoup d’émotion qu’elle est revenue sur les traces de son enfance en compagnie de sa famille. « En ouvrant une fenêtre sur cette période de ma vie, je souhaite faire dialoguer présent et passé. Et montrer à mes enfants que, face à des situations cauchemardesques comme le drame que j’ai vécu, on peut trouver de l’espoir et une réelle humanité. »
Pour elle, La Maison de Terre des hommes Valais représente un cocon salvateur. « La bonté que j’y ai ressentie est venue contrebalancer mon malheur. J’étais une enfant innocente, sans réponse face à la violence des autres et à leurs conséquences directes. Dans mon cas, de graves brûlures et une vie brisée. »
Par cette visite, elle tient aussi à exprimer sa gratitude. « Je suis reconnaissante du fond du cœur pour mon accueil à La Maison dans les années 80. J’ai un profond respect pour tout le personnel de l’institution qui, encore aujourd’hui, fait tout pour sauver des enfants malades ou accidentés. »
Dépasser ses difficultés
Iman estime que les nombreuses mains tendues à La Maison aident à franchir les difficultés. « C’est un lieu qui relie les êtres humains à travers des valeurs comme la générosité, l’entraide, la coopération, sans distinction ethnique ou religieuse. »
Elle explique que le cadre paisible de La Maison, les jeux et interactions avec les autres enfants, ont été primordiaux pour retrouver un équilibre psychologique, autant pour elle que pour son frère. « On jouait notamment au baby-foot, aux jeux de société et on faisait des puzzles. Et le dimanche on cuisinait tous ensemble. » Leur convalescence à La Maison leur a en quelque sorte permis de renaître, comme le souligne Iman.
Tout comme son frère, Iman estime qu’il faut dépasser ses difficultés dans la vie. Le drame vécu l’a poussée à en faire toujours plus, à être la meilleure en classe. En 2000, elle est partie en France pour faire son doctorat en biologie et santé, puis a fondé une famille. Elle cherche également à être un exemple pour ses enfants, notamment pour son fils aîné, atteint d’une malformation congénitale qui le restreint parfois dans certaines activités.
Des souvenirs intacts
Lors de sa visite à Massongex, Iman a redécouvert le pavillon où elle logeait, la chambre « Blanche-Neige » où elle dormait, le réfectoire où elle mangeait avec les autres pensionnaires. « J’ai l’impression de vivre un rêve en revenant ici. Avec l’âge, je souhaite revoir le film de ma vie dès le début, mémoriser le passé, le transmettre à mes enfants. Il est important que les générations suivantes tirent des leçons de paix et de solidarité, surtout avec la situation actuelle dans le monde et au Liban en particulier. »
Iman était déjà revenue à La Maison en 2003 avec son frère Imad et sa famille. La visite avait même donné lieu à un reportage dans L’Illustré. Plus de vingt ans plus tard, c’est à son tour de faire découvrir le lieu à ses enfants.
« J’ai vécu la meilleure journée de ma vie », s’exclame Saïd, le fils aîné d’Iman, au moment de partir après un après-midi qui lui a permis d’entrevoir un pan essentiel de l’enfance de sa maman. « Quand j’ai lu l’article du magazine, je voulais absolument voir l’endroit où ma maman avait vécu entre 1985 et 1987 après son accident. Merci infiniment à La Maison d’avoir accueilli et soigné ma maman, car sans vous elle ne serait pas là, et mon frère et moi non plus. »