Je me dois d’être là pour les enfants! - Maison de Terre des hommes

Je me dois d’être là pour les enfants!

écrit le 15.12.2021

Rencontre d’une éducatrice de La Maison engagée pour les enfants.

L’histoire de La Maison, c’est d’abord celle de milliers de guérisons, mais c’est aussi celle de tous ceux, qui ont, petit à petit, façonné ce lieu unique. Des femmes et des hommes qui se penchent quotidiennement et inlassablement à hauteur des enfants accueillis.

Malgré le flux permanent des départs et des arrivées, La Maison crée un univers stimulant et sécurisant, à la fois proche du milieu familial et riche en découvertes. Migena et ses collègues travaillent dans le respect de la dignité, de la nationalité et de la confession des enfants. La jeune femme fait partie de l’équipe éducative de La Maison. Elle définit son rôle comme celui de parent de substitution pour les enfants qui sont accueillis à La Maison. « Je suis en accord avec mes valeurs. J’adore les enfants, je fais mon travail avec le cœur. » déclare-t-elle lors de cet entretien.

Éclairage sur les réussites, les difficultés et les joies rencontrées lors de l’accueil des enfants à La Maison. A son échelle, la jeune femme construit un monde qui n’est plus seulement solidaire dans les attentes, mais aussi dans les faits.

À quoi ressemble une journée type pour toi à La Maison ?

J’accompagne les enfants de leur réveil à leur coucher. La vie à La Maison est très différente d’une crèche ou d’un internat, parce que les enfants ne retrouvent pas leurs parents avant un long moment, souvent plusieurs mois. Mon rôle est vraiment de les accompagner, de les soutenir, dans les moments de peur comme ceux qui précèdent une opération ou les moments de manque avec leur famille. J’ai également la chance de partager avec eux des beaux moments de joie. Ces enfants viennent de loin, ils sont seuls, je me dois d’être là pour eux. 

La particularité de La Maison au niveau éducatif : réside-t-elle alors dans cette relation très proche qui est tissée avec les enfants ?

Oui, absolument, mes collègues et moi sommes vraiment avec eux tous les jours dans tous les moments de leur vie pendant leur séjour en Suisse. Quand je rentre le soir chez moi, je sens que j’ai été présente pour eux, car j’ai mis tout mon cœur dans tous les moments partagés avec eux. Lorsqu’un enfant se met à pleurer pendant la journée, je le prends dans mes bras pour le consoler, pour le rassurer, l’apaiser et combler un peu le manque qu’il ressent. Je partage des moments très forts de joie et de tendresse avec eux.

Une proximité s’installe avec les enfants ?

Évidemment, ça m’avait marqué d’ailleurs, au début quand j’avais commencé à travailler ici. Lorsqu’on arrive au travail, les enfants sont super heureux de nous voir, ils nous sautent dans les bras. Ce sont les enfants qui installent cette proximité avec nous, le personnel de La Maison.

Et les enfants, que t’apportent-ils ?

Ils sont tellement courageux et me donnent vraiment une leçon de vie ; particulièrement les enfants cardiaques, essoufflés au moindre effort et extrêmement fatigués. Malgré ça, ils ont encore une force de vie incroyable, qui leur permet de supporter une opération à cœur ouvert. C’est vraiment incroyable d’être témoin de leur résilience et de leur renaissance. Ils m’apportent aussi beaucoup de bonheur. Le fait de passer du temps auprès d’eux, ça me fait du bien. Ils sont tellement heureux et ils ont l’envie de partager ce bonheur avec nous. Lorsqu’on est près d’eux, on se concentre sur le moment présent, sur l’instant de partage. 

La mission de La Maison est très spécifique, comment t’identifies-tu à celle-ci ?

J’aime ce que je fais. Je me dis que j’ai de la chance de pouvoir aider des enfants malades. Cette institution est unique. Je viens réellement en aide à des enfants qui n’ont pas d’autres options que celle de venir dans un pays qu’ils ne connaissent pas pour se faire soigner. Ils sont dans le besoin et, ici, on est dans l’action. On apporte chacun, à notre échelle, notre propre goutte d’eau dans cet océan. Pour nous qui les côtoyons, la confrontation à des cultures tellement différentes des nôtres est vraiment une expérience très enrichissante. 

Quel regard portes-tu sur tes activités ?

Mon engagement pour les enfants se fait très naturellement. Je suis en accord avec mes valeurs. J’adore les enfants et je fais mon travail avec le cœur. Quand je les entends rire, ou les vois courir, après des opérations si complexes, ça donne tout son sens à mon engagement.

Comment gères-tu le comportement des enfants accueillis ?

Je dois donner aux enfants les bons outils et prendre le temps de leur expliquer les règles, les valeurs à respecter et les comportements à adopter pour une vie harmonieuse à La Maison. Ils s’en rendent déjà bien compte au moment où ils arrivent à Massongex. 

L’année 2021 est encore chamboulée par le Covid-19. Comment se passe l’organisation au niveau de l’équipe éducative ? Quels sont les défis principaux ?

Nous continuons de faire très attention aux règles de conduite et d’hygiène. Notre objectif principal est d’accueillir les enfants dans les meilleures conditions possibles en sachant que la situation par rapport au Covid-19 reste très compliquée. Les mesures instaurées comme les quarantaines pour les enfants ont nécessité et nécessitent encore de multiples ajustements.

Ces mesures permettant d’interrompre les chaînes de transmission du virus sont-elles compliquées à mettre en place avec des enfants ?

C’est plus compliqué avec les tout petits. Ils veulent aller vers les autres enfants et on les en empêche. C’est difficile de leur expliquer les raisons et ça les rend tristes. C’est dur pour eux. Quand ils arrivent ici, les enfants aimeraient pouvoir se mélanger aux autres, mais comme on doit respecter ces quarantaines, ils se sentent assez seuls. On essaie d’organiser plus d’appels avec leur famille pour les aider à traverser ces débuts difficiles et on les rassure du mieux qu’on peut. On vous sent soulagée du chemin parcouru avec les enfants pendant ces derniers mois. 

Comment s’est déroulée l’organisation du travail avec vos collègues pendant cette crise sanitaire ?

Le Pavillon (l’un des deux bâtiments destinés à l’accueil des enfants) est toujours fermé. L’équipe éducative travaille moins d’heures que d’habitude. Nous nous croisons beaucoup moins entre collègues et nous avons également moins l’occasion de parler des enfants, de leurs comportements et de leurs soucis. Nous nous servons beaucoup plus du cahier des transmissions dans lequel nous recensons et traçons l’ensemble des informations dont la bonne circulation au sein de l’équipe garantit la qualité de l’accompagnement des enfants. 

On parle souvent de la « grande famille » Terre des hommes. Est-ce que tu as l’impression de faire partie de cette grande famille ?

Oui, complètement. Quand je suis arrivée à La Maison, je me souviens avoir vraiment ressenti cet esprit de « grande famille » et le partage de valeurs communes. Chaque employé sait qu’il œuvre pour le même but: accueillir et prendre en charge des enfants et leur permettre de rentrer soignés chez eux. Le bien-être de l’enfant: une préoccupation commune ? Clairement, on s’intéresse tous à eux. Leur bien-être est notre seule préoccupation et elle nous unit. Cette dynamique facilite la création de liens entre nous et avec les personnes externes à La Maison qui s’engagent pour les enfants. On ressent vraiment une cohésion entre nous tous qui œuvrons pour les enfants.

Dans ce journal (numéro 166, décembre 2021), un éclairage est apporté sur la gestion des urgences à La Maison, quelle expérience t’a particulièrement marquée ? 

Il n’y a pas très longtemps le petit Aboubacar venait d’arriver à La Maison et il n’était pas encore opéré. Un jour, après sa douche, j’ai vu qu’il n’était pas très bien ; je l’ai pris dans mes bras. Il était très essoufflé et respirait fort et vite. Je l’ai rapidement amené à l’infirmerie. Une de mes collègues infirmières s’est occupée immédiatement de lui. Elle l’a mis sous oxygène, mais son état ne s’est pas amélioré et il a été transféré en ambulance à l’hôpital où son état a pu être stabilisé; un énorme soulagement. Les enfants de La Maison nécessitent une attention de tous les instants. 

Un mot aux lecteurs ?

J’aimerais leur dire que si l’occasion se présente ; venez à La Maison ! Vous comprendrez l’importance de ce que La Maison réalise pour tous ces enfants.